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Baisse de financement et incertitudes futures: Impact sur la réponse humanitaire en RDC

Dernière mise à jour : 9 avr.

Kinshasa, République Démocratique du Congo (RDC), 08 avril 2025 : Les organisations membres du Forum des ONG Internationales en RDC tirent la sonnette d'alarme alors que des coupes brutales dans les financements et l’incertitude sur leur avenir est en train de changer radicalement le paysage de la réponse humanitaire en RDC. Les coupes opérées par les Etats-Unis pourraient à terme représenter jusqu'à 70% de réduction du financement de la réponse humanitaire par rapport à 2024, dans un contexte de réduction globale de l'aide internationale.


Les violents affrontements dans le Nord et le Sud-Kivu fin janvier, aggravés par les violences en cours dans les provinces d'Ituri et de Mai Ndombe, ont fait des milliers de morts et des millions de déplacés. Il y a 21 alertes de surveillance des maladies et des épidémies actives de rougeole, de variole du singe, de choléra et autres dans le pays. Plus de 25,6 millions de personnes sont confrontées à une insécurité alimentaire aiguë, tandis que plus de 4,5 millions d'enfants de moins de 5 ans souffrent de malnutrition aiguë. Parallèlement, les cas d’exploitation et de violences sexuelles sont en nette augmentation . Dans ce contexte, une réponse prévisible et dotée de ressources adéquates est plus critique que jamais.


Les piliers essentiels de la réponse, qui constituent une bouée de sauvetage pour des millions de personnes, sont mis à l’arrêt . Bien que certains projets soient réactivés, cette reprise a lieu avec une visibilité qui se compte en semaines ou moins. La plupart des partenaires attendent toujours le remboursement des activités déjà réalisées et le paiement de celles en cours. Cela érode des décennies de confiance et d'acceptation que les acteurs de la réponse ont construit avec les communautés locales, des fondations pourtant indispensables aux actions de consolidation de la paix et de cohésion sociale.


Des risques disproportionnés pèsent sur les partenaires nationaux et locaux . Les réductions de financement affectent non seulement leur viabilité, compromettant des années de travail en faveur de partenariats plus équitables et d’une allocation plus juste des ressources, mais suscitent également l'indignation des communautés affectées, à qui une aide a été promise mais pas mise en œuvre.


Dr. De-Joseph Kakisingi, directeur de l'ONG nationale SAD et coordinateur de la Plateforme CONAFOHD, a souligné que « les ONG nationales et locales n'étaient pas préparées à ces réductions soudaines et inattendues. Plusieurs d'entre elles se sont retrouvées avec des dettes qu'elles ne peuvent pas payer car elles avaient préfinancé des activités pour lesquelles elles n'ont pas reçu de remboursement. Il est possible que plusieurs organisations doivent fermer leurs portes en conséquence».


Avec le démantèlement de programmes clés de résilience, des années d'investissement seront perdues et les risques de recrutement forcé, d'enrôlement dans les groupes armés et d'autres mécanismes d'adaptation négatifs monteront en flèche. Cette situation sera aggravée par la perte de programmes d'éducation essentiels, exposant davantage les jeunes à ces risques. En outre, la suppression des principaux mécanismes de retour d'information et de redevabilité accroît fortement le risque d'inefficacité et de perte d'information sur la fraude, le gaspillage et les violations graves dans les programmes restants.


Les organisations locales, notamment celles dirigées par des femmes et de défense des droits des femmes, sont durement touchées par ces réductions. Sandrine LUSAMBA, coordinatrice nationale de l'ONG nationale Solidarité Féminine pour la Paix et le Développement (SOFEPADI), a déclaré que « comme les financements ont été réduits et coupés, les programmes de consolidation de la paix et de cohésion sociale ont été réduits, ce qui, dans un contexte d'insécurité persistante, compromet des années de programmation en faveur d'initiatives de résilience des femmes et d'une plus grande responsabilisation. En outre, de nombreuses femmes qui avaient bénéficié d'une formation à la création et gestion de petites et moyennes entreprises à Goma se sont retrouvées sans sources de revenus, ce qui les a obligées à recourir à des mécanismes d'adaptation négatifs et, dans certains cas, à retourner dans des zones d'insécurité ».


Les membres du forum des ONGI attirent d'urgence l'attention sur les risques sanitaires, nationaux et internationaux, liés à la propagation des épidémies en République Démocratique du Congo . Les capacités de dépistage, de vaccination et de traitement étant réduites en raison d'un manque de financement, le risque de prolifération des maladies ne fait que croître. La perte de confiance dans le secteur de l'aide et la réduction du financement des mécanismes de soutien au niveau communautaire pourraient entraîner l'apparition de comportements sociaux propices à la transmission, tout en compromettant les possibilités de traitement.


En l'absence d'une solution immédiate, la réduction de l'aide privera d'antirétroviraux au début du mois d'avril, plus de 8 200 personnes cherchant à se faire soigner pour le VIH . Les kits de prophylaxie post-exposition sont également en nombre insuffisant et risquent d'être bientôt épuisés s'ils ne sont pas réapprovisionnés d'urgence - ce qui signifie, entre autres, que les victimes de viols seront encore plus exposées au risque de contracter le VIH. La vaccination pour traiter et prévenir la variole simienne (Mpox) - qui constitue une urgence sanitaire mondiale avec 69 158 cas suspects et 1 392 décès entre janvier 2024 et janvier 2025 - est menacée. Le dépistage rapide chute de manière inquiétante, avec une baisse de plus de 10 % au cours des dernières semaines, alors que les centres ferment et que le personnel est licencié. Les banques de sang sont également compromises, avec des stocks qui se font rares, ce qui affecte la capacité à répondre aux urgences traumatiques et besoins chirurgicaux.


La crise en RDC ne relève pas d’une situation ordinaire. L’ampleur des besoins est exceptionnelle, et la réponse ne peut pas attendre


  • De nouveaux financements, provenant de sources nouvelles et alternatives, doivent être mis à disposition immédiatement pour combler les lacunes. Une attention particulière doit être portée aux secteurs les plus durement touchés par l'arrêt des subventions américaines: la sécurité alimentaire intégrée, incluant la nutrition, l'eau, l'assainissement et l'hygiène (WASH), la santé et la protection.

  • Le financement doit être flexible, en donnant la priorité à des modalités telles que l'assistance en argent liquide qui permet aux populations touchées de répondre à leurs besoins spécifiques les plus urgents. Il doit également être directement accessible aux acteurs et groupes de réponse nationaux et locaux.

  • Les donateurs doivent renforcer leur coordination pour combler de manière complémentaire les lacunes critiques dans la réponse.

  • Les acteurs humanitaires doivent immédiatement élaborer et diffuser des communications claires aux communautés affectées, aux chefs de communautés et aux autorités concernant les réductions de financement, en mettant l'accent sur les voies d'orientation vers les services existants toujours disponibles. Les acteurs humanitaires doivent d'urgence redéfinir les priorités de leur travail de manière transparente et consultative, en tenant compte des besoins exprimés par les communautés touchées.


    « Nous ne pouvons pas rester immobiles. L’inaction coûte des vies. Réduire l’aide en pleine crise majeure brise la confiance. Abandonner maintenant n’est pas une option. Les lacunes les plus vitales doivent donc être comblées immédiatement. Malgré tout, nous ne pourrons échapper aux choix difficiles sur les activités humanitaires qui devront être coupées. Pour les faire, il faut regarder la réalité en face : écouter davantage, agir plus vite, avec clarté. Soutenons les acteurs locaux en première ligne. L’aide doit aller là où les personnes et les communautés disent en avoir le plus besoin. La solidarité doit être notre pierre angulaire. Faisons confiance à celles et ceux qui vivent la crise. Finançons leurs actions. Appuyons leurs solutions», a déclaré Luc Lamprière, directeur du Forum des ONG Internationales en RDC.




 
 
 

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